Volontariat pour RSPB Haweswater
- Julia
- 11 févr. 2018
- 7 min de lecture
Une histoire de train...
Je ne sais pas ce qui m'a pris quand j'ai acheté mon billet pour Penrith. J'ai probablement dû regarder les prix, prendre le moins cher ou j'ai du me dire "plus je partirais tôt, plus je profiterais de ma journée". Quoi qu'il en soit, mon train était à 7h30 ce matin. 7h30 ça veut dire se lever à 5h30 pour avoir le temps de se préparer et de ne rien oublier. Ça veut dire, enfourcher mon vélo à 6h30 pour ne pas arriver en catastrophe à la gare de Balloch qui se situe à 7 km de Fruin Farm. Il fait nuit et froid. C'est à peine si mes phares éclairent les plaques de verglas. Je roule assez vite pour me réchauffer. J'évite de justesse une biche morte affalé sur le bitume de la piste cyclable qui me laisse échapper un cri de peur et de dégoût à la fois. Enfin, j'arrive à point nommé mais quelque peu gelée.
Une bonne heure de train s'est écoulée quand j'arrive à la gare de Glasgow Queen Street. Je dois descendre et rejoindre la gare de Glasgow Central qui se trouve à 10 minutes à pied. J'ai pas préparé la route sur mon GPS comme je peux le faire dans mes moments de grande prévention. Pourquoi perdre mon temps sur un ordinateur à préparer un tracé de 3 km ou bien m'acharner sur le Google maps de mon portable qui ne marche pas alors qu'il me suffit de demander à quelqu'un ? Rhha toute cette technologie nous perdra...
Je croise un point d'information. Ici, deux femmes en gilet jaune, yeux ébahi et sourire aux lèvres, écoutent l'histoire que raconte un homme tout aussi bien vêtu, en attendant allèchement la chute qui va suivre. Je ne souhaite pas les couper. Je me place à leur niveau attendant que l'un d'eux me remarque. L'homme semble avoir fini son histoire et se retourne vers moi, tout ouïe. Dans un anglais plus ou moins assuré, je lui dit "Hi, could you explain me how to go to the Glasgow Central Station" (Bonjour, Pourriez-vous m'expliquer comment aller à la gare Glasgow Central ?). Avant même que j'ai le temps de lui dire "Please", il s'élance vers la sortie en me disant "Yes sure, I show you ! You will see, it's very easy" (Oui bien sur, je te montre ! Tu va voir, c'est vraiment facile). Vu ma capacité à tout comprendre en Anglais, j'avais bien peur d'enregistrer que la moitié de ses paroles. Il a fait des grands gestes en me montrant la gauche, puis a parlé de Golden Street. J'ai hoché la tête faisant signe d'avoir tout compris et l'ai remercié. J'étais pas convaincu de ce que je faisais mais j'ai fait ce que je croyais avoir compris. Ma foi, je dois dire que je suis plutôt fière d'être arrivée face à l'entrée de la gare sans le moindre détour.
Lorsque j'arrive au quai correspondant, mon train attend que les voyageurs montent. Il est différent de ceux que j'ai pris jusqu'à maintenant et je ne vois pas l'emplacement réservé aux vélos. Un homme me fait comprendre que c'est au début du train. Je retourne en arrière et en effet, une porte fermée affichant le logo d'un vélo s'y trouve. Je cherche le bouton de l'ouverture automatique mais rien ne semble s'apparenter à ça. A la place, c'est une serrure au trou carré qui me montre le bout de son nez, semblant me dire "Coincée !". Je cherche à nouveau de l'aide. Un policier se balade dans les parages. Je lui explique ma situation. Il semble ne pas bien savoir quoi faire pour m'aider. Il fini par chercher une personne de la compagnie. Quelques secondes plus tard, j’aperçois un homme ou une femme, à vrai dire j'y prête pas trop attention, avec en main une clé en forme de T au bout carré. C'est pour moi !
Nous étions déjà arrivé à Penrith quand j'ai réalisé que j'étais de nouveau coincée si personne ne pensait à m'ouvrir ...Je panique. Je ne me rappelle plus les mots que j'ai prononcé pour qu'une jeune femme vienne à mon secours. Elle me sourit pour me rassurer, semblant croire que j'ai juste pas vu le bouton de la porte automatique. Je lui montre que non, il n'y a rien à actionner ici, à part des trappes de sécurité. J'étais prête à abandonner mon vélo sur place et parcourir le couloir du train en poussant tout le monde pour aller chercher un contrôleur. Heureusement, ça n'a pas été nécessaire. Il est venu de lui même par l’extérieure du train et m'a ouvert la porte sur Penrith. Les jambes flageolantes et le visage déteint, je descend du train en poussant une profonde expiration de soulagement.
Le séjour à Haweswater :
Je suis accueillie par Spike, un salarié de l'organisation. Sans beaucoup de conviction, nous installons mon vélo dans le coffre de sa break. Ca rentre sans même avoir le besoin de démonter mon deux roues. Nous arrivons à Naddle Farm. C'est ici que se situe les bureaux et les chambres des volontaires. C'est une vielle ferme avec des plafonds qui rase la tête des plus grand et des larges escaliers au bois foncé. Chaque volontaire possède sa propre chambre. La cuisine, la salle de bain et le salon sont en commun. Il y a aussi un bureau où les volontaires stationnent yeux rivé sur leur téléphone pour se connecter au reste du monde. C'est la seule pièce de la ferme qui possède une connexion au WIFI.
A peine arrivée que Spike m’embarque avec lui pour un petit boulot d'une petite heure. Je découvre les beaux paysages vallonné qui m'entourent. Ils sont jonché par de multiples murs en pierres et quasiment dénudés d'arbres. En rentrant, je fais la rencontre de Will puis plus tard d'Alice. Ils sont les deux autres volontaires qui vont séjourner avec moi. Les jours suivant, je rencontre Dave et Mal tous deux salariés et je découvre l'essentiel des travaux que nous avons à effectuer. Nous plantons des arbres qui sont peu nombreux dans la région dû à une activité pastorale trop importante et à une population de cerfs élevée. Nous démontons et posons des clôtures qui permettent de mobiliser la population de cerfs sur une même zone et afin d'éviter qu'ils empêchent les jeunes forêts de pousser. Nous installons des portails au départ de sentier afin d'éviter que les moutons, pour la plupart en liberté, ne rentrent dans ses mêmes zones.
Il a neigé 30 cm en cette fin de deuxième semaine. Nous avons donc profité de deux jours de repos en plus du week-end. Le chauffage de la ferme n'en fait qu'à sa tête et ne démarre jamais à l'heure à laquelle il est programmé. Le samedi, Will passe son après-midi à nous confectionner une luge à l'aide de quelques vieux bois de construction récupéré pendant que Alice et moi allons à pied jusqu'au petit magasin de Bampton. De retour à la ferme, la luge est prête. Nous montons la colline qui se trouve derrière le bâtiment. Je m'installe sur la luge pendant que Will met toute son énergie pour m'élancer dans la pente. Il lâche la luge et je me retrouve exactement à la même place où il m'avait laissée. Je n'ai pas glissée d'un centimètre. Nous avons bien rigolé. Nous passons nos soirées regroupé dans le salon, poêle tournant avec 4 à 5 bûches à l'heure, regardant des films ou des émissions pas toujours intéressante, jouant aux cartes ou lisant un bon livre emmitouflés dans nos duvets. C'est d'ailleurs à ce moment là, que j'entame "Wild" de Cheryl Strayed. Un livre qu'une amie m'avait conseillé au tout début de mon voyage en me disant que ça lui faisait penser à moi. Comme vous vous en doutez, c'est compliqué de se procurer des livres en français en Angleterre. J'ai le moyen de me les faire livrer mais les frais d'envois sont assez élevé. Je me suis donc appliquée au monde du numérique et j'ai acheté le livre à partir de Google Play Stores. Ce moyen ne me plait guère. Cependant, je dois avouer qu'il assouvi largement ma soif de lecture française qui me manquait suite à la fin de mon "Maigret". Dans ce livre, Cheryl Strayed raconte l'année où elle a décidé d'affronter le Pacific Crest Trail, plus couramment appelé le PCT. C'est une grande randonnée qui traverse en grande partie la Sierra Nevada à l'Ouest des Etats-Unis. Elle s'effectue en moyenne sur 3 mois et fait partie des plus longues du pays. Cheryl a, a peu près, mon âge quand elle décide de faire cette ascension alors qu'elle avait que très peu d'expérience en la matière. Je ne peu pas m'empêcher de m'identifier à elle. Elle m'aide à comprendre les motivations qui m'ont poussée à faire ce voyage. Celles profondes, qu'on n'exprime pas car on ne trouve pas les mots justes pour le faire, ou encore celles dont on n'a même pas conscience.
Je fini mon séjour avec une semaine pluvieuse. Nous profitons d'une fin d'après midi pour aller observer le "Hen Harrier". C'est un petit rapace qu'on rencontre aussi en France et qu'on nomme Busard Saint-Martin. On le différencie du Busard cendré par son plumage gris claire et l'absence de bande noire sur le dessus et le dessous de ses ailes. Le mâle possède également un croupion blanc prononcé qui n’apparaît pas chez le mâle du Busard cendré. Nous embarquons dans la voiture de Spike. Nous roulons les yeux rivés vers l’extérieure à l’affût du moindre vol. Vingt minutes plus tard, toujours rien. Nous nous arrêtons et descendons pour avoir une meilleur vu d'ensemble. Ca caille ! Nous regardons chacun dans nos jumelles. Seul des cerfs broutent au loin. Nous repartons. La nuit commence tout doucement à descendre quand Will, à l’œil affûté, semble avoir aperçu un mouvement. C'est bien le Saint-Martin ! Nous le suivons depuis la voiture jusqu'à ce qu'il s'arrête dans un champ. Son plumage se confond tellement avec le milieu que je n'ai pas la chance de le voir posé. Cependant, je l'ai bien observé en vol et j'ai pu remarqué ce V blanc bien prononcé à la base de sa queue. Un beau souvenir que j'avais envie de vous partager ;) !